Colloque international organisé par l’université François-Rabelais de Tours (CESR), l’Institut universitaire de France, le Centre de recherche du château de Versailles et l’université de Liège (Transitions).
Ce colloque international a réfléchi à la notion de clergé de cour en Europe sous l’Ancien régime, que nous pouvons définir de manière large comme l’ensemble des membres du clergé qui entraient dans la curia regis pour y recevoir ou y remplir une charge ou une mission, le plus souvent validée par un office, une commission et/ou une dignité s’exerçant soit dans le cadre de la Chapelle (grands aumôniers, prédicateurs, confesseurs en pays catholiques, etc.), soit dans celui du Conseil et de ses prolongements administratifs (diplomatie, armée, information, etc.).
Ce projet de recherche collective a pris en compte les deux versants du service : le religieux (dans sa dimension théologique, spirituelle et liturgique) et le politique (dans sa dimension décisionnelle, gouvernementale et administrative) pour tenter d’en comprendre et d’en dégager sur la longue durée, les fonctions, les interrelations et les finalités au sein de l’économie curiale.
Cette notion de clergé de cour a l’avantage d’être globalisante et systémique : elle ne définit pas les ecclésiastiques uniquement par leur relation aux princes et aux rois et donc par le jeu de la faveur, du don et du contre-don, ni seulement par le type d’activité (Chapelle, Conseil, diplomatie, etc.), mais essentiellement par la nature polymorphe du service et aussi par le système sociopolitique dans lequel il s’inscrit.
Présents dans les entourages princiers depuis l’époque carolingienne, les ecclésiastiques prennent dès la fin du Moyen-Âge des postes clés dans les cours princières en voie de formation, non seulement dans les systèmes administratifs et les conseils mais aussi dans les Chapelles qui se gonflent de nouveaux effectifs et de nouvelles dignités. Ils deviennent l’une des composantes essentielles de l’espace curial aux côtés des autres serviteurs du prince. Si des spécificités techniques apparaissent durant la Renaissance, les deux mondes de la Chapelle et du Conseil fonctionnent souvent en étroite symbiose.
Les études historiques portant sur le personnel de cour se sont jusqu’à présent beaucoup intéressées aux laïcs (nobles et officiers) mais rarement à ce groupe de l’espace aulique qui représente l’un des plus solides appuis des pouvoirs princiers. Cela tient pour l’essentiel à l’idée en partie erronée que la cléricature aulique n’était qu’une dignité ou une charge, revêtue par les membres de la noblesse pour accroître leurs revenus et leur pouvoir, mais non pour servir leur Église. Ce point de vue exclut d’emblée les motivations, les stratégies et les croyances religieuses du champ de la réflexion sociopolitique. Cependant, ces serviteurs avaient la particularité d’être situés non seulement entre la cour et l’Église, mais aussi entre le prince et Dieu. Ils apparaissent donc comme un objet d’étude particulièrement pertinent pour appréhender les relations entre la religion et le politique en Europe et, si l’on se place à un niveau institutionnel, entre les Églises et les États.
Ce projet a accordé une part prioritaire à la dimension européenne et chrétienne du sujet. Il a étudié le centre des cours sans négliger les autres types de missions politico-religieuses confiées à ces ecclésiastiques, ni des rapports qu’ils entretenaient avec leurs bénéfices cléricaux. À travers ce colloque international, il s’agissait donc de faire apparaître les interrelations entre la religion et le politique, mais aussi ces éventuelles phases de prise de distance ou de séparation.