Colloque organisé par le Centre de recherche du château de Versailles et le château de Versailles.
Fermés au public le 26 août 1939, le château de Versailles et ses célèbres jardins se sont métamorphosés en quelques semaines, sous l’effet des mesures de défense passive. Un reportage photographique complet, dressé par l’agence de l’architecte en chef, Patrice Bonnet, témoigne de cette transformation aussi soudaine que radicale. Pour le palais, on retiendra l’obturation de très nombreuses fenêtres par un empilement de sacs de sable et des panneaux de bois, le démontage et mise en dépôt de nombreux décors historiques, l’évacuation des collections du musée en région, etc. Les jardins font également l’objet de mesures importantes, comme l’assèchement du Grand Canal, le calfeutrage de sculptures, l’installation d’abris pour le personnel… Anticipées et programmées depuis de nombreux mois, voire même plusieurs années, certaines d’entre elles obéissent au vaste programme de défense passive défini au cours des années 1930. En raison de son symbole et au Diktat qu’il incarne outre-Rhin, Versailles bénéficie d’une protection hors-norme, mal comprise par le public qui se voit privé de ses trésors, tout comme par l’occupant, qui juge de façon assez critique l’ampleur des restaurations nécessaires à sa remise en état.
Le 1er juin 1941 - soit presque un an après son invasion par l’armée allemande - le musée national du château de Versailles retrouve un semblant de « vie » en rouvrant une vingtaine de salles dans l’aile Nord du château. À l’occasion de ce quatre-vingtième anniversaire, ce colloque entend mettre la lumière sur les mesures de protection déployées dans les très nombreux châteaux-musées répartis dans les anciens départements de la Seine, de la Seine-et-Oise, de la Seine-et-Marne, et dans leurs régions limitrophes. Beaucoup d’entre eux sont d’anciennes résidences royales et impériales, certains utilisés comme lieux de réception et de résidence présidentiels.
Si des études individuelles propres à cette période ont été menées jusqu’à ce jour, privilégiant un examen monument par monument, elles ne se sont pas ou peu focalisées de façon globale sur un territoire. Dans ce colloque, le choix porté sur une région resserrée, proche de Paris et en zone occupée, et sur une typologie patrimoniale bien définie, à savoir les châteaux-musées, se veut une sorte d’enquête de terrain, destinée à établir des comparaisons et faire la lumière sur une histoire commune. Par leur nature, ces établissements constituent des zones de protection stratégiques. Objets de mesures spécifiques, ces ensembles patrimoniaux sont l’objet d’attentions bien particulières, à volumétrie variable cependant, tant de la part de l’occupé que de l’occupant. D’autre part, ces châteaux constituent aussi, durant cette guerre, des espaces de dépôt privilégiés pour la préservation des collections, qu’elles soient publiques ou bien encore privées.
Comment a-t-on protégé ces lieux patrimoniaux d’exception et de quelle manière ? Quelles conséquences ont eu ces mesures de défense passive ? À quelle échelle se sont-elles déployées ? Peut-on aujourd’hui juger de la pertinence, mais surtout de leur efficacité ? L’absence des collections a-t-elle constitué un moment propice pour repenser le musée, en termes de disposition des collections, d’accrochage, de circuit de visite ? Quelles sont les destructions imputables à la Seconde Guerre mondiale, et auquel cas par qui et par quoi ont-elles été occasionnées ?
Ainsi ce colloque sera l’occasion de décrire l’ensemble des mesures de protection mises en place (évacuations, mesures destinées au monument et aux collections, etc.), de rendre compte de la vie dans ces musées entre 1939 et 1945 (de la « drôle de guerre » à la signature de la Paix) mais aussi de définir la place de l’occupant dans ces châteaux. Après un bilan historiographique et de nombreuses études de cas, le débat s’ouvrira sur des aspects plus larges : la gestion en région des châteaux sélectionnés comme dépôts (constituant des sortes de musées en caisses), le rôle du service de protection allemand des œuvres d’art (Kunstschutz), la protection nationale et internationale, et l’évocation d’exemples nationaux et internationaux.
Direction scientifique : Claire Bonnotte Khelil, collaboratrice scientifique, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon
Un programme de recherche « Châteaux et musées en Europe : un patrimoine artistique à l’épreuve de la guerre (XIXe-XXe siècles) » est actuellement en cours en lien avec ce colloque.
Ce colloque, ouvert à toutes et à tous, a eu lieu du jeudi 3 juin au vendredi 4 juin 2021 et s’est tenu intégralement en ligne en raison du contexte sanitaire, en diffusion en direct sur la chaîne Youtube du château de Versailles.
Les actes du colloque sont parus, sous la direction de Claire Bonnotte Khelil et Christina Kott, le 24 avril 2024 aux éditions Hermann.
La playlist des enregistrements audio est disponible sur la chaîne Youtube du Centre de recherche :