Saint-Simon et la question religieuse : écrire les affaires du temps

Si le Versailles que Saint-Simon nous donne à voir dans ses Mémoires lui vaut une réputation de potinier bien méritée, ce portraitiste unique et féroce de ses contemporains n’en est pas moins un chrétien sincère, se cachant de ses fréquentes retraites à l’abbaye de la Trappe. Fidèle à la mémoire de Rancé, sa « boussole », il s’inquiète par scrupule religieux du manque de charité de l’histoire et rédige, au seuil de ses Mémoires, une préface tourmentée qui place le sentiment religieux au cœur de son œuvre principale.

La foi du mémorialiste est complexe et parcourue de tensions. Saint-Simon est l’ami des jésuites, mais il admire Port-Royal et ses saints solitaires, tout en se déclarant profondément éloigné du jansénisme. Même s’il prend très nettement ses distances avec Fénelon et le quiétisme, il reste politiquement proche du petit troupeau qui l’entoure, et ne cesse d’admirer la dévotion de son célèbre élève le duc de Bourgogne, ainsi que la piété des ducs de Beauvillier et de Chevreuse. La religion de Saint-Simon ne saurait ainsi être enfermée ou résumée par aucun courant ou aucune amitié. C’est donc en relisant les pages que les Mémoires consacrent aux grandes affaires religieuses du temps que cette journée a permis de dessiner le portrait spirituel du duc de Saint-Simon.

Les communications paraîtront dans Les Cahiers Saint-Simon n°52.